Vernis de violon: artisanal, industriel, à l’huile ou l’alcool
Le vernis de violon est tantôt mystérieux, avec une élaboration artisanale contenant des substances naturelles parfois gardées secrètes, tantôt issu des industries chimiques. Voici un parcours dans le vernis de violon, la description des vernis à l’huile ou à l’alcool et un détour par le vernis de Stradivari…
Les recettes de vernis de violon sont-elles vraiment secrètes?
Le vernis de violon s’emploie depuis plusieurs siècles. Les luthiers en peaufinent l’élaboration au fil des ans afin de parvenir à la recette parfaite. L’objectif de tout luthier est de réussir un subtil mélange permettant au bois de rendre la meilleure sonorité possible tout en offrant une protection durable et un bel aspect à l’instrument. En raison des efforts de longue haleine que requiert la mise au point de cette recette parfaite, les doses et ingrédients composant le vernis restent souvent secrets et alimentent le mystère.
Pourtant, la plupart des ingrédients utilisés sont parfaitement connus des professionnels et le travail de recherche du luthier porte plutôt sur le choix des substances employées et sur leurs proportions. Ainsi, la recette parfaite de vernis n’existe pas, chaque luthier ou chaque violoniste pourra apprécier les vertus et contraintes des différents vernis.
Lors de l’élaboration d’un vernis, on recherche une élasticité et une résistance qui ne mettront pas la sonorité de l’instrument en péril et permettront aux fibres de bois de vibrer correctement, tout en assurant une bonne protection à l’instrument.
Vernis du commerce
On trouve actuellement dans le commerce des vernis spécialisés qui sont conçus pour les instruments du quatuor et qui procurent une sonorité correcte aux instruments, avec toutefois des résultats disparates. Ils sont souvent fabriqués de manière industrielle mais on peut également se procurer des vernis artisanaux. Beaucoup de luthiers produisent encore leur vernis ou ajoutent des substances à des vernis de base pour en modifier les propriétés. On trouve donc dans le commerce un grand choix de produits naturels ou chimiques: des substances pour élaborer son propre vernis, pour la préparation du bois, des pigments que l’on pourra ajouter à des vernis de base ou des substances qui nous permettent de modifier les caractéristiques finales d’un vernis.
Les types de vernis de violon
Pour vernir un violon, deux types de recettes s’offrent au luthier : le vernis à l’huile ou le vernis à l’alcool.
Le vernis à l’huile
Comme son nom l’indique, il est élaboré à base d’huile. Cette dernière doit être siccative, c’est-à-dire qu’elle doit avoir la capacité de sécher. On peut par exemple utiliser l’huile de lin, crue ou cuite. Viennent ensuite d’autres ingrédients et pigments ajoutés par le luthier afin de modifier les caractéristiques de son vernis. Un autre ingrédient typique est la résine qui procure, selon la substance employée plus de dureté, de brillance, de résistance ou de plasticité au vernis.
Le vernis à l’huile est beaucoup plus long à sécher et comme de nombreuses couches doivent se succéder de la préparation du bois aux couches finales, les luthiers évitent parfois de l’employer lorsqu’ils sont contraints par le temps ou qu’il s’agit d’instruments bon marché. Il est plus simple à appliquer que le vernis à l’alcool puisqu’il laisse beaucoup de temps au facteur qui peut modifier sa couche de vernis ou la travailler, lorsqu’un effet est désiré. Par ailleurs, il offre généralement une très bonne flexibilité, ce qui est favorable à la sonorité puisqu’il permet une bonne vibration des fibres de bois.
Le vernis à l’alcool
Ici, c’est une base d’alcool qui est employée. Cet alcool sert à dissoudre diverses résines comme l’ambre ou la gomme laque. Comme pour le vernis à l’huile, on peut également y ajouter d’autres ingrédients et pigments. Saviez-vous que l’on peut même élaborer du vernis à l’alcool avec de la colophane?
Le vernis à l’alcool est beaucoup plus rapide à sécher. Il est donc idéal pour terminer des instruments rapidement. Il est moins facile à appliquer que le vernis à l’huile, séchant très vite, et il est plus difficile de reprendre un défaut d’application ou de faire des effets visuels avec des couches vernis pigmentées. Mais surtout, il est généralement moins flexible que le vernis à l’huile et pour ses raisons, il est moins apprécié. (souvenez-vous: la flexibilité du vernis favorise la vibration des fibres du bois)
Le vernis de Stradivari
Les violons de Stradivari sont toujours au cœur des débats. Les études se succèdent et des scientifiques cherchent constamment des théories nouvelles pour essayer de comprendre la ou les raisons de la qualité sonore de ces instruments.
Le vernis a souvent été évoqué dans des théories échafaudées au fil des ans. Elles ont, tour à tour, été réfutées. D’ailleurs, voici le propos de Jean-Philippe Echard, conservateur, lors de la publication d’une recherche en 2009:
« Pendant deux cent cinquante ans, on a tout entendu, tout imaginé. En termes de sonorité, comme de couleur. On a dit que Stradivari ajoutait au liant de l’ambre fossile, de la propolis, cette gomme rougeâtre que les abeilles recueillent sur certains bourgeons, ou encore de la coquille de crustacés… »
D’après ce même chercheur qui a mené avec une équipe franco-allemande une recherche étendue sur quatre ans, Stradivari utilisait une simple huile siccative comme base, comme l’huile de lin. Dans la deuxième couche, une huile du même type mélangée à une résine.
Pour la couleur, Stradivari aurait employé, tout au long de sa vie divers pigments : de l’oxyde de fer, puis du sulfate de mercure pour finir avec un pigment à base de cochenille.
Ces études successives démystifient toujours un peu plus le grand maître de la lutherie. Pourtant, nous serons toujours en admiration devant la beauté de sa facture et l’importance historique de ses instruments.
Image à la Une, prise dans notre atelier en 2016, lors de l’application d’un vernis à l’huile.