Sherlock Holmes et le violon
Sherlock Holmes et le violon
Sherlock Holmes, le plus célèbre des personnages littéraires d’Arthur Conan Doyle apparaît pour la première fois dans une publication en 1887. Au total, il fait l’objet de quatre romans et 56 nouvelles. Son activité de « détective consultant » lui permet de déployer son pouvoir de déduction infaillible pour déjouer les esprits criminels les plus ingénieux. Entre autres clichés qui ont su nous séduire, il est présenté comme un grand mélomane et un violoniste accompli.
Alors que l’association de Holmes au violon est souvent affirmée dans les médias, cette passion n’est pas si évidente lorsque l’on se rapproche de l’œuvre de Conan. Contrairement aux autres accessoires qui le caractérisent aujourd’hui (loupe, pipe ou chapeau de chasse), plusieurs allusions à Holmes mélomane ou violoniste figurent bien dans les textes originaux. Les références à Holmes jouant du violon sont plutôt rares, mais elles sont suffisantes pour donner l’image d’un homme cultivé qui possède… Devinez? Mais oui, un Stradivarius.
La plupart des histoires de Holmes sont racontées par son fidèle compagnon, le Dr. John Watson, second personnage des célèbres aventures policières. Dans La pierre de Mazarin de 1921, Watson décrit une visite dans la résidence londonienne de Holmes, au 221B Baker Street et son plaisir à observer les diagrammes scientifiques sur les murs, les traces de produits chimiques, l’étui à violon qui traîne dans un coin.
Le violon de Sherlock
Pour en savoir plus sur le contenu de l’étui à violon, il faut se référer à la nouvelle L’aventure de la boîte en carton de 1892 qui présente Watson en plein déjeuner avec Holmes. Ce dernier ne parle que de violons, et raconte avec bonheur l’achat de son Stradivarius auprès d’un courtier de Tottenham Court Road pour une cinquantaine de shillings. Holmes estime dans la même nouvelle que son violon vaut au moins 500 guinées. Il donc semble avoir fait une excellente affaire, le prix de marché estimé étant près de 200 fois supérieur à son prix d’achat. Le détective démontre même un intérêt pour la lutherie dans Une vente de charité de 1896, alors qu’il lit un article « très intéressant » sur les arbres de Crémone et les raisons de la proéminence de la facture instrumentale locale.
Holmes mélomane
Quel est le violoniste favori de Holmes ? C’est Paganini : il le considère comme un homme extraordinaire.
Dans Une étude en rouge de 1887, on trouve Holmes assistant à un concert de la virtuose Wilma Neruda, dont « l’attaque et la main d’archet sont splendides ».
Par ailleurs, un concert de Sarasate emmène Holmes et Watson à St James’s Hall dans La ligue des rouquins de 1891. Sarasate était bien entendu au goût de Holmes, selon Watson qui le décrit « enveloppé du bonheur le plus complet, remuant délicatement ses longs doigts au rythme de la musique ».
Le violon au centre de l’action
La seule aventure où le violon prend une importance notoire dans le récit est dans La pierre de Mazarin. Il trompe ses adversaires en prétendant jouer La Bacarolle d’Hoffman (Contes d’Offenbach) dans une pièce voisine. Il met alors le disque dans la pièce en question et les adversaires de Holmes ne remarquent pas qu’il s’agit d’un enregistrement et non de musique en direct (On constate ici une déplorable oreille musicale des malfaiteurs!)
Dans Le signe des quatre, le violon intensifie la relation amicale des deux personnages. Sherlock veut aider Watson à s’endormir après une journée difficile et lui joue du violon:
« Il prit son violon, et il commença de jouer tandis que je m’allongeais. C’était un air rêveur et mélodieux ; de sa propre composition certainement, car il savait improviser avec beaucoup de talent. Je me souviens vaguement de ses bras maigres, de son visage attentif, et du va-et-vient de l’archet. Puis il me sembla que je m’éloignais paisiblement, flottant sur une douce mer de sons, pour ensuite atteindre le royaume des rêves où le joli visage de Mary Morstan se penchait vers moi. »
Holmes était-il un bon violoniste ?
Ici, les opinions semblent diverger. Même si Conan montre souvent le côté mélomane de son personnage, il décrit très peu Holmes jouant du violon et il n’est jamais décrit jouant avec des partitions. Il n’y a pas non plus de références à des participations à des concerts ou à un jeu avec accompagnement. Dans Une étude en rouge, Watson décrit les capacités de Holmes : « Ses talents de violoniste étaient remarquables …mais aussi excentriques que ses autres accomplissements ».
Il est aussi décrit par Watson comme « un musicien enthousiaste, non seulement talentueux, mais aussi un compositeur émérite ».
Certains critiques, comme Lain Sinclair considèrent d’après Une étude en rouge, que Holmes n’est pas si doué au violon. Ce dernier évoque une rudesse, associée à son activité policière. Il faut tout de même souligner que Conan Doyle fait évoluer son personnage au fil du temps et que dans les œuvres suivantes, on trouve plus de références à ses talents de musicien. Conan Doyle a vraisemblablement décidé de conférer à son personnage un trait de caractère plus fin et cultivé pour la suite de ses aventures.
Même si les textes originaux montrent peu de références au violon, Sherlock Holmes reste largement associé au violon, après tout, ni son chapeau ni sa pipe ne sont décrits dans les romans !
Sherlock Holmes et le violon dans les films et séries
Dernièrement, plusieurs productions audiovisuelles ont entretenu la flamme pour le personnage de Conan. Voici quelques exemples des productions les plus récentes.
Sherlock (Série)
Série de la BBC qui présente une version actuelle de Sherlock. L’acteur principal, Benedict Cumberbatch, malgré toute la sympathie et la bonne volonté que l’on veut bien lui vouer n’est pas tellement convainquant au violon. A sa décharge, il n’est pas du tout violoniste et n’a été entraîné que pendant une semaine par la violoniste Eos Chater, membre du groupe Bond qui assure également la bande son. Le violon dont il est censé jouer est un violon chinois d’une valeur approximative de 1000 euros. A voir, ici, là ou là…
Sherlock Holmes de Guy Ritchie (Film)
Rares apparitions d’un violon dans les mains de Robert Downey, qui n’est manifestement pas violoniste non plus dans la vraie vie. Faites vous votre opinion ici.
Scène de réflexion où il jette son violon, là..
A écouter, Rocky Road to Dublin, morceau populaire de musique irlandaise illustrant une bagarre de Sherlock dans le film. Dans le film, ici et très belle version au violon de ce morceau, là.
Elementary (Série)
Encore une série dédiée à Sherlock et Watson. Cette fois, une plus grande liberté encore a été prise par rapport aux romans originaux. Sherlock (Jonny Lee Miller) sort d’un centre de désintoxication, il vit aux Etats-Unis et Watson, incarnée par une femme, Lucy Liu, est chargée de le surveiller. Malgré tout, il est violoniste et dans les premiers épisodes, il cherche à se débarrasser de son violon en le brûlant. (Rassurez-vous, le violon va bien, il en rejoue un peu plus tard dans la série)
A la Une, peinture représentant Benedict Cumberbatch dans Sherlock, série de la BBC (poster proposé ici).